• Mon béton est plus beau que la pierre

  • 2022
  • Beaux-Arts de Paris, exposition personnelle

Appartement témoin

Il y a dans l’appartement témoin un enjeu double de projection et de réalisation. Quand Auguste Perret réalise les premiers blocs de ce qui deviendra un vaste quartier de la ville du Havre, le défi est réel pour l’architecte qui doit à la fois convaincre des futurs habitants et à la fois trouver un modèle d’immeuble transposable à grande échelle et à un budget réduit. L’appartement témoin est pour Raphaël Maman le lieu où s’éprouve la rationalisation qui permet de maîtriser les coûts et qui influe, plus ou moins consciemment, sur le quotidien. Les proportions d’un appartement moderniste, même si celui-ci peut-être aménagé, personnalisé sont normées et appellent un nouveau mobilier, moderne et des nouveaux usages, on ne circule pas de la même manière, et l’on occupe les pièces selon un autre rythme. Dans son installation en hommage à Perret, Raphaël Maman propose à l’échelle 1, c’est à dire sur 100 m2, d’examiner les fonctions que distribue l’appartement : l’espace du coucher, celui de l’assise mais en restant au niveau des fondations. Jouant des composantes du béton, matériau signature de l’architecte, l’artiste évoque une chaise avec des barres d’armature, un matelas avec du ciment et dispose les bois de coffrage de manière à suggérer des murs que l’on pourrait pousser, réarranger. Tout reste au niveau du sol, comme autant de possibles, et l’artiste s’attache à rendre compte du moment décisif de la mise en œuvre en rappelant les gestes et les outils des ouvriers (fils à plomb, serre-joint, crayons de menuisier) lors du chantier. Avec l’appartement témoin, Raphaël Maman plante un décor et en même temps révèle son envers et ses limites.

Henri Guette

© Photos : Adrien Thibault

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